« Jesse Washington allait avoir dix-sept ans. Peut-être était-il un peu retardé mental. Il travaillait comme le reste de sa famille dans les champs de coton des Fryer, près de Waco, au Texas. Le 8 mai 1916, la fermière est assassinée chez elle, sans doute violée. Jesse Washington, arrêté, avoue le crime. Son procès est prévu pour le lundi 15 mai. Pendant le week-end, des milliers de personnes affluent à Waco : un lynchage s'organise. Dans une salle où s'entassent des centaines d'hommes en armes, le jury a à peine le temps de le déclarer coupable que, aux cris de « Get the nigger ! », un groupe s'empare de lui … »
Cet extrait de Le Lynchage aux Etats-Unis de Joël Michel, est le préambule de ce qui sera un événement d'une extrême atrocité. G.T.N (Intellectual amnesia I ) a émergé de la déstructuration et la réappropriation de ce souvenir résultant de diverses lectures anthropologiques.

Le temps passé en résidence aux Ateliers Topaz a permis une remémoration, qui a conduit à une affectation mentale. De cette résonance est survenu le processus de création, où le corps et l'esprit s'acharnent à s'équilibrer, à s'accorder afin de permettre une renaissance, une élévation. Ce fait du passé me ramène indubitablement à la place que j'occupe, en tant que caribéen descendant d'esclaves membre de la diaspora africaine dans le monde moderne occidental.

Kant disait à propos du Je : « Posséder le Je dans sa représentation : ce pouvoir élève l'homme infiniment au-dessus de tous les autres êtres vivants sur Terre. Par là il est une personne. »

Posséder ce Je, implique selon moi, une certaine connaissance de l'héritage historique, scientifique et spirituel de ce qui fait que je suis ici et maintenant.

Ainsi, G.T.N (Intellectual amnesia I ) se découvre comme étant un espace empreint d'une scénographie singulière. Il est une représentation en perspective de mon cheminement. A travers analyses et questionnements, l'installation qu'est G.T.N, donne à voir différents médiums qui dialoguent. La question de l'amnésie intellectuelle se pose alors : quelle place accorder aux événements historiques dans notre réel ? Tirons-nous réellement un enseignement du passé ou le refusons nous consciemment ? Au regard du monde moderne, le doute demeure...


« Jesse Washington was going to be seventeen. Maybe he was a little mentally retarded. He worked like the rest of his family in the Fryer cotton fields, near Waco, Texas. On May 8, 1916, the farmer’s wife is murdered at home, probably raped. Jesse Washington, arrested, confesses the crime. His trial is scheduled for Monday, May 15. During the weekend, thousands of people flock to Waco: a lynching is organized. In a room packed with hundreds of armed men, the jury barely had time to convict him that, shouting "Get the nigger! », a group seizes him … » This excerpt from Lynching in the United States by Joel Michel, is the preamble of what will be an event of extreme atrocity. G.T.N (Intellectual Amnesia) emerged from the breakdown and the re-appropriation of this memory, resulting from various anthropological readings. The time spent in residence at the Topaz Studio allowed a memory retrieval, which led to a mental affectation. From this resonance came the process of creation, where the body and mind strive to balance, to agree in order to allow a rebirth, an elevation. This fact of the past undoubtedly brings me back to the place I occupy as a Caribbean descendant of slaves and members of the African diaspora in the modern Western world. Kant said about the I: "To possess the I in its representation: this power raises man infinitely above all other living beings on Earth. Thus he is a person. » To possess this I implies, in my opinion, a certain knowledge of the historical, scientific and spiritual legacy of what makes me here and now. Thus G.T.N (Intellectual amnesia I) is discovered as a space imbued with a singular scenography. This is a representation in perspective of my path. Through analysis and questioning, the installation G.T.N gives to see different mediums that dialogue with each other. The question of intellectual amnesia then arises: what place to give to historical events in our reality ? Do we really learn from the past ? Or do we reject it consciously ? With regard to the modern world, the doubt remains …